De l’art de concilier marchés publics et la réalité des projets web

Image représentant les marchés publics
Comment naviguer dans un monde où les procédures de marchés publics sont le plus souvent inadéquates avec la réalité des projets web ? Quelles solutions pour mener à terme nos projets, dans le respect des souhaits du client, des délais et du budget ? Le récit de notre expérience en tant qu’agence web Drupal, une main tendue vers les structures publiques.

Parlons peu, parlons bien. Les procédures de marchés publics sont inadaptées aux projets web. On observe un décalage quasi systématique entre le cadre fixé par l’appel d’offres et les contraintes réelles du projet qui se révèlent à nous tout au long de l’exécution de la prestation. De quoi rendre obsolètes les spécifications, le calendrier et le budget estimés en amont et sur lesquels le prestataire est juridiquement engagé. Toutefois, il demeure dans l’intérêt général que le projet réponde au besoin du client, qu’il soit rentable pour le prestataire, et surtout, qu’il aboutisse. Dès lors, pour faire coïncider contraintes contractuelles et contraintes réelles du projet, nous avons dû développer et intégrer à nos process une culture du dialogue et du compromis.

Le coût d’un appel d’offres

Pour la réalisation de leurs projets web, les établissements publics ou assimilés émettent des appels d’offres. Ces derniers fixent le cadre de la procédure d'achats publics afin de garantir une mise en concurrence équitable entre les candidats d’une part, et d'obtenir le meilleur rapport qualité prix, d’autre part.

Pour les candidats, ces procédures d’achats ont un prix : celui de s’engager dans un processus plutôt lourd, rigide et chronophage pour ses équipes. Il faudra notamment présenter sa société, ses moyens matériels et humains, remplir moult paperasses afin de montrer patte blanche, prouver la solidité et la fiabilité de l’entreprise. Et bien sûr, faire une proposition de prestation en adéquation avec le besoin présenté par l’acheteur et la deviser.

Une réponse faite “à l’aveugle”

Le problème, c’est qu’un tel engagement se fait sans garantie de succès. Et, disons-le, avec parfois une grande incertitude quant à l’adéquation de notre réponse au besoin du donneur d’ordre. En effet, dans le cadre de l'appel d’offres, aucun contact n’est possible entre l’acheteur et le candidat. Impossible donc de s’assurer que le besoin de l’un a bien été compris par l’autre. En tant que candidat, on doit donc faire avec un dossier plus ou moins clair, sans possibilité de se faire confirmer ou infirmer des informations capitales.

La seule communication prévue par la procédure est l’envoi de questions/réponses interposées. Mais les réponses aux questions apportent souvent le minimum de précisions. Ou bien elles arrivent trop tard, puisque l’acheteur peut répondre jusqu'à 6 jours avant l'envoi de la candidature. Autant dire que si la question est structurante, il est trop tard pour réviser sa copie.

Photo illustrant un Directeur de projet Drupal dépité par la rigidité des procédures de marchés publics

Le match est-il joué d'avance ?

Dans les faits, dans la majorité des cas, le candidat se retrouve contraint de répondre sur la base d’hypothèses appuyées sur sa compréhension du besoin. Cette réponse faite "à l’aveugle" s’oppose ainsi à l’objectif initial de ces procédures d’achats publics. À savoir, offrir une mise en concurrence équitable entre les acteurs. Par sa connaissance du contexte, de l’acheteur et de l’historique du contrat, le prestataire déjà en place se dote d'un redoutable avantage ne laissant que peu de chances aux challengers.

Résultats des courses : les marchés publics nécessitent beaucoup d’investissement pour des chances de succès… disons minces ! Dès lors, il est pertinent de se demander combien de candidats s'autocensurent, découragés par la procédure.

Une procédure particulièrement inadéquate au projet web

Les procédures de marchés publics sont d’autant plus inadaptées aux projets web. Les raisons sont multiples, comme l’explique très bien dans son billet, Christophe Le Jeune, Directeur Général d’Alfa-safety, un hébergeur/infogéreur spécialisé en applications web. Il évoque par exemple un cadre technique très en retard sur les bonnes pratiques du marché et l’évolution rapide des technologies, ou encore des délais de réponses trop courts.

Par ailleurs, délimiter précisément un projet web en amont est une tâche très complexe, voire impossible. On vous explique ! Les projets web sont par nature itératifs : ils se construisent pas à pas, sur le terrain, en se heurtant au réel, notamment à la demande du client, aux besoins des utilisateurs, aux contraintes techniques. Si se rapprocher du réel est plus probable grâce à des services d'assistance à maîtrise d’ouvrage, seule une démarche empirique, construite entre le prestataire et l’acheteur, permet une délimitation juste du périmètre, du calendrier et du budget.

Il y a le cadre, et il y a ce qu’on en fait

Maintenant qu’on a dit ça, quoi ? Qu’est-ce qu’on peut faire pour concilier le cadre contractuel et la réalité ? D’après notre expérience, c’est toujours la même rengaine. Ce n’est qu’une fois le marché remporté et le projet lancé qu’on peut commencer à vraiment le définir.

Tout commence lors de la réunion de lancement. On questionne le client sur ses besoins, on découvre ses priorités, les fonctionnalités qui lui sont essentielles et le temps d’implication qu’elles vont réellement nécessiter. On distingue également les fonctionnalités moins importantes, celles qui pourraient par exemple être mises en place dans le cadre d’une V2. 

Photo illustrant le dialogue et les compromis arbitré lors d'un comité de projet

Bien souvent, ce n’est qu’ici qu’on comprend réellement le projet et ses implications en termes de charge de travail. Par exemple, on découvre que les données à récupérer sur une base de données client est en réalité mal structurée et va nécessiter un travail beaucoup plus fastidieux que prévu.

Notre cotation initiale devient donc rapidement obsolète et des ajustements s’imposent.

Ces ajustements sont systématiques et caractéristiques de l’inadéquation des procédures de marchés et de la réalisation d’un projet web Drupal. Dans l’exécution, les deux partis doivent faire preuve d’agilité pour obtenir un résultat proche du besoin du donneur d’ordre et du budget engagé. Pour le bon aboutissement du projet, il faut donc compter sur la bonne volonté du donneur d’ordre et du prestataire.

D’autant que les deux partis ne sont pas sur un pied d’égalité. D’un côté, nous avons une administration, couverte par la procédure d’appel d’offres. De l’autre, une entreprise privée qui s’est engagée “à l’aveugle” sur un budget et un planning, pour une prestation dont elle découvrira le périmètre réel a posteriori. Elle joue alors la rentabilité de sa société, ce qui peut peser sur sa pérennité.

Développer et intégrer une culture du dialogue et du compromis

Ce décalage entre le contrat et le réel est un élément parfaitement connu, anticipé et intégré à notre fonctionnement. Pour y parer, nous avons développé une culture du dialogue et du compromis.

On écoute, on analyse, on échange, on transige, on aboutit.

Nous savons aussi pouvoir compter - la plupart du temps ;) - sur la bonne volonté des clients qui au fil des années se sont accoutumés à ce type de projet. En effet, forts de leurs expériences passées, les organismes publics ont parfois connu des échecs, pris conscience des contraintes du web, de son processus itératif.

Toutes les parties ont donc intérêt à s’entendre, car tous ont à perdre.

Pour le prestataire : un client, un projet, les futurs projets qui en découlent et le paiement du travail engagé.

Pour l’administration, la réalisation de son projet, de l’argent public perdu et des services publics mal servis.

Parlons-nous !

Si cette culture du dialogue vous parle, n’hésitez pas à nous contacter pour échanger autour de ces procédures qui encadrent nos relations. Poussons les portes, dialoguons. Et bien entendu, parlons de vos projets web Drupal !